Résumé :
En Égypte, les années 2011 et 2012 ont vu l’émergence de deux mobilisations inédites revendiquant la reconnaissance des droits des travailleuses informelles du service à domicile. Il s’agit du « syndicat indépendant des domestiques salariées » et de « l’association pour la défense et la promotion des droits des domestiques et de leurs familles ». Ce mouvement social s’est inscrit dans le cadre de projets bureaucratisés et financés par des bailleurs de fond internationaux qui ont augmenté leurs investissements après la révolution pour soutenir une société civile en « transition démocratique ». Au-delà des oppositions binaires entre « authenticité culturelle » et « modèles universels d’émancipation », le but de cette communication est de comprendre comment ces femmes vivent et s’approprient cette expérience d’engagement. En se basant sur une enquête de terrain ethnographique combinant entretiens et observations, je reviendrai en premier temps sur le processus d’organisation des travailleuses domestiques en situation révolutionnaire, en second temps, à partir de l’analyse des trajectoires des travailleuses domestiques mobilisées, il s’agira de différencier deux registres de participation au sein de ces deux collectifs, à savoir l’engagement discret et la prise de parole publique. Finalement, je montrerai que si la lutte collective s’est confrontée à différentes contraintes organisationnelles, politiques et sociales, la rupture biographique induite par l’expérience d’engagement au sein de ces deux collectifs a profondément redéfini le sens subjectif que ces femmes ont de la justice, entraînant ainsi différents effets biographiques selon l’expérience militante vécue, la nature du pouvoir contesté et le registre de lutte mobilisé. Mots clés : Femmes pauvres, mobilisations improbables, politisation, rapports sociaux de domination, agnecy, effets biographiques de l’engagement.
Biographie :
Ranime Alsheltawy est doctorante et attachée d’enseignement et de recherche en science politique au sein de l’Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales de l’université Paris Dauphine. Depuis Octobre 2014 elle réalise une thèse sous la direction de Catherine Achin