Bourse et finance
Dans un contexte de flottement de la livre, l’inflation sous-jacente a augmenté de deux points par rapport au mois de septembre et se chiffre à 15,75 %.
Les réserves de devises étrangères s’élevaient à 19 milliards de dollars fin octobre contre 19,6 milliards le mois précédent. Elles étaient, pour rappel, de 36 milliards avant la révolution de 2011. L’État se montre volontaire pour augmenter ses réserves et a pris diverses mesures, parmi lesquelles l’ouverture du capital de la Banque du Caire ainsi que l’achat d’obligations européennes et irlandaises.
Balance commerciale et principaux partenaires
Le déficit commercial du pays était de 37,8 milliards de dollars en août 2016, une baisse de 3,1 % par rapport au même mois l’année passée. Les exportations ont augmenté de 22,9 % sur la même période et les importations de 3,6 %. Ces chiffres montrent le dynamisme de la reprise de l’économie égyptienne en dépit des nombreuses difficultés que connaît le pays.
Toujours d’après le CAPMAS (Institut national égyptien des statistiques), la Chine était le pays qui exportait le plus vers l‘Egypte en 2015, tandis que les deux premiers pays importateurs de produits égyptiens étaient respectivement l’Inde et le Japon.
Les premiers effets du flottement de la livre
La mesure décidée par la Banque centrale égyptienne a été applaudie et soutenue par les grandes institutions financières internationales ainsi que les agences de notation. Bénéficiant de ce vent de sympathie, les banques égyptiennes ont déjà levé 3 milliards de dollars.
Le taux de change officiel a rapidement rejoint celui du marché noir : la dernière semaine de novembre, un euro s’échangeait contre presque 19 livres.
Une pénurie de médicaments à venir ?
De nombreux observateurs s’alarment de l’explosion des coûts de production des médicaments (+ 70%) dans un secteur qui importe 90% des composants nécessaires à leur fabrication : les deux tiers des usines seraient menacés de disparition. Les fabricants réclament la flexibilité des prix, qui sont actuellement invariables et fixés par le ministère de la santé, pour amortir cette augmentation des coûts de fabrication.
Prêts internationaux
Le Fonds monétaire international
Annoncé au mois d’août, le prêt de 12 milliards de dollars a finalement été accordé à l’Égypte par l’institution financière internationale. Il sera versé en plusieurs tranches, dont la première (2,75 milliards) a été reçue début novembre. Cet échelonnement permet au FMI de subordonner les prochains versements au bon avancement des réformes et de contrôler que les sommes sont utilisées selon ses recommandations. Le remboursement du prêt prendra dix ans selon les sources officielles.
Le pays s’est lancé dans un programme de réformes visant à réduire les dépenses publiques, conformément aux attentes du FMI. Les dernières mesures prises ont été le flottement de la livre et la baisse des subventions pour l’achat de carburant. Cette dernière entraîne l’augmentation du prix des services de transport en commun (Revue de presse – Ville / novembre 2016)
Sur le plan des institutions, la Banque égyptienne d’agriculture a été absorbée par la Banque centrale égyptienne afin d’améliorer les services financiers de l’État auprès des agriculteurs : à l’heure actuelle, 7 941 fermiers seraient en difficulté pour rembourser leurs emprunts.
La Banque mondiale
L’Égypte a obtenu en août un prêt de 3 milliards de dollars, le premier tiers sera versé en janvier 2017. Ce prêt vient s’ajouter à celui accordé par l’institution pour créer des emplois en Haute-Égypte, évoqué dans la précédente revue de presse.
Prêts européens
Le pays est en négociation avec plusieurs États européens pour l’obtention de prêts d’une valeur totale de 800 millions de dollars, dans le cadre d’accords bilatéraux. Ils ont pour vocation d’alléger l’impact de la crise économique et des mesures d’austérité prises par le gouvernement sur les pauvres.
Investissements étrangers
L’État a lancé au début du mois de novembre un ensemble de mesures destinées à attirer les investisseurs dans le pays, avec notamment l’exemption de taxes sur les producteurs dans certains secteurs considérés comme stratégiques. La suspension de la taxe de 10% sur les revenus du capital, décidée en juin 2014, a été prolongée pour deux années supplémentaires.
L’ambassade britannique a annoncé que le groupe British Petroleum prévoyait d’investir 13 milliards de dollars en Égypte avant 2020. Côté français, une conférence économique sur les investissements dans le pays s’est tenue le 22 novembre. Hébergée par le journal Al Ahram hebdo, elle a été l’occasion de rappeler que 130 entreprises françaises sont implantées en Égypte et qu’elles emploient 33 000 personnes.
Les partenaires européens pour le développement, regroupant le KFW group (banque allemande de développement), l’Agence française pour le développement (AFD) et la Banque européenne d’investissement, vont accorder un fond de 296 milliards de dollars pour la construction d’une ferme éolienne dans le Golfe de Suez.
Canal de Suez
L’embellie envisagée le mois précédent ne s’est pas confirmée et les revenus du canal sont en baisse de 7% en octobre par rapport à l’année précédente.
Le gouvernement égyptien a nommé en août une autorité en charge du développement d’une zone de libre échange autour du Canal de Suez. Celle-ci mesure 460 km² et a pour but de transformer l’aire du canal en un important centre industriel et commercial. Elle prévoit d’utiliser majoritairement des devises étrangères.
Le creusement du nouveau canal, projet phare du début de mandat du président Al Sissi, avait été en grande partie financé par des bons du trésor vendus aux citoyens égyptiens (les Suez canal certificates) en septembre 2014. Le ministère des finances a annoncé l’augmentation des taux d’intérêt de ces bons à 15,5 % (contre 12% précédemment), ils ne pourront être vendus que cinq ans après leur achat.
Pétrole et gaz naturel
Suspension des livraisons de l’ARAMCO
La Compagnie nationale saoudienne d’hydrocarbures (ARAMCO) a une nouvelle fois confirmé la suspension des livraisons de pétrole à Égypte pour une durée indéterminée et sans plus de précisions. L’Égypte s’est logiquement tournée vers le marché international pour suppléer ce défaut de fourniture, un contrat a notamment été signé avec l’Irak (Revue de presse – Ressources / novembre 2016).
Gaz naturel
La société British Petroleum a racheté 10% de la concession de l’italien ENI sur le gisement de Zohr découvert l’année dernière en Méditerranée.
Tourisme
La campagne de séduction à l’international se poursuit…
Le pays poursuit sa compagne de séduction à l’international, avec l’objectif de faire revenir des touristes en voie de disparition depuis la révolution de 2011 et dissuadés par les crash de deux avions, en octobre 2015 et en mai 2016. Le ministre du tourisme Yehia Rashed, en visite à Londres dans le cadre du World Trade Market, a plaidé pour le retour des vols charters britanniques à destination de Sharm el Sheikh. De son côté, l’ambassadeur égyptien à Londres a accusé les Britanniques de « boycotter » le tourisme en Égypte. Ce discours a trouvé un écho chez l’Organisation mondiale du tourisme qui a demandé officiellement aux pays concernés de retirer l’Égypte de leurs listes des destinations interdites ou formellement déconseillées.
Taxe sur la valeur ajoutée des produits touristiques
Le pays envisage également de supprimer la taxe sur la valeur ajoutée concernant les produits égyptiens vendus aux touristes étrangers. Cette mesure, déjà en projet avant les années 2010, doit favoriser les dépenses des visiteurs ainsi que les productions nationales, notamment artisanales, qui leur sont destinés.
Secteur primaire et alimentation
Subvention des denrées par le gouvernement
Le 31 octobre, le ministre du commerce et de l’approvisionnement a déclaré que le pays disposait désormais de réserves allant de cinq à six mois pour les biens de premières nécessité (riz, sucre et blé pour l’essentiel).
D’après un rapport du CAPMAS, publié en octobre, 71 millions d’Égyptiens utilisent les cartes subventionnées de l’État pour acheter des produits de première nécessité, dans un pays qui compterait, selon la même source, 27,8 % de pauvres dans sa population. Le seuil de pauvreté est fixé à un revenu mensuel de 482 livres égyptiennes, soit environ 25 euros par mois depuis la dévaluation.
Dans ce contexte et après qu’une étude, réalisée dans le gouvernorat de Baseera, a révélé qu’une majorité de foyers considérés comme « aisés » avaient recours à ces cartes subventionnées, le gouvernement a décidé de réformer le système de prix de ces produits. Ces derniers seront taxés progressivement en fonction du salaire mensuel des citoyens propriétaires de cartes. Si ce projet s’inscrit effectivement dans le programme de réformes de l’État pour diminuer les dépenses publiques, il signale aussi la volonté de transformer les structures de l’économie du pays, laquelle repose en bonne partie sur le secteur informel : mettre en place ces prix progressifs suppose de mesurer les salaires et donc de faire passer ce secteur dans la sphère légale et quantifiable de l’économie…
Le ministère des finances a décidé de retirer la taxe sur les importations de sucre, qui s’élevait à 20% du prix de base depuis le mois de février.
L’entreprise Al Nouran va bientôt commencer la construction d’une nouvelle usine de sucre, la plus grande de la région Maghreb – Moyen Orient. La première ligne de production devrait ouvrir au printemps 2017 et couvrira l’équivalent d’un quart des importations actuelles du pays. L’objectif est d’atteindre 100% des importations une fois l’usine terminée, laquelle comptera au total quatre lignes de production.
CRÉSUT Pierre