Séminaire du réseau de recherche (2020-2021)
Productions et circulations des biens culturels :
Le cas des pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du nord
https://culturmena.hypotheses.org/1747
Le séminaire 2020-2021 s’articule autour de la thématique de la présence culturelle française dans les pays de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
Les séances ont lieu le jeudi entre 14h00 à 16h00 au bâtiment Sud du Campus Condorcet (5 cours des Humanités 93322 Aubervilliers cedex) situé à la sortie du métro Front Populaire (ligne 12).
Pour suivre sur place ou à distance le séminaire, merci de vous inscrire impérativement ici.
Séance 1 : 15 octobre 2020 – salle 3.023 (3ème étage)
Jade Montané : L’implantation de l’AFP au Moyen-Orient et en Afrique du Nord : une longue histoire rythmée par des accords entre les grandes agences de presse, la décolonisation et les enjeux stratégiques de l’Etat français
Comment l’Agence France-Presse est-elle devenue une des principales sources d’information des médias du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord ? L’AFP voit le jour en 1944, à la Libération de Paris dans le but de recréer une grande agence de presse française capable de faire entendre sa voix aux quatre coins du monde. Pour le rayonnement de la France à l’étranger, l’AFP hérite des bureaux bâtis par l’agence Havas, l’une des plus grandes agences de presse des XIXe et XXe siècles et de la fusion des différentes agences dissidentes de l’Office français d’information (OFI), ancienne branche information d’Havas, transformée par le gouvernement de Vichy en vecteur de la propagande nazie. C’est à Londres que d’anciens journalistes d’Havas information donnent naissance à l’Agence française indépendante (AFI), première agence dissidente de l’OFI, qui prend pied au Caire, au Liban, en Syrie et en Palestine. En 1942, c’est le bureau d’Havas à Alger qui fait sécession afin d’émettre comme l’AFI une information française « libre ». Après la Seconde Guerre mondiale, la nouvelle AFP est présente dans la majorité des pays d’Afrique du Nord qui sont sous domination française mais aussi en Egypte, au Liban, en Turquie, en Iran, en Palestine et en Israël. Après la guerre d’Algérie, l’AFP, qui était la seule agence de presse à avoir un bureau à Alger garde, voire développe, sa présence sur le continent africain. Au Moyen-Orient, la décolonisation et le souhait du Général de Gaulle d’étendre l’influence française offrent à l’AFP les moyens de diffuser un service de nouvelles en langue arabe et devenir, dans les années 1970, la principale source d’information des médias de la région y compris pour les pays du Golfe qui étaient sous domination britannique. En 1987, pour continuer à couvrir et à transmettre son information à l’ensemble des pays de la région dont Israël et faciliter la circulation de ses journalistes, l’AFP installe sa direction régionale du Moyen-Orient dans un pays « neutre » à Chypre. Après le printemps arabe, les trois bureaux d’Afrique du Nord sont rattachés à Nicosie qui devient la direction régionale Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) qui gère l’ensemble des bureaux de la zone et diffuse, en texte, photo et vidéo, une information en anglais, arabe et français.
Jade Montané vient de finaliser un doctorat en histoire : L’AFP une entreprise unique, des origines à l’histoire de son statut d’exception, 1832-2015. Chargée des projets d’éducation à l’Agence France Presse, elle travaille actuellement sur deux programmes : un projet européen d’éducation aux médias, Youcheck! en partenariat avec l’université d’Uppsala en Suède, des universités espagnole et roumaine ainsi que des chercheurs de Paris 3 Sorbonne Nouvelle ; un projet d’éducation pour le ministère de l’Education nationale et particulièrement pour le portail edutheque.fr. Enfin, elle enseigne l’histoire des médias et la culture numérique à l’Université de Saint Quentin en Yvelines (UVSQ).
Séance 2. Jeudi 19 novembre 2020 – – salle 3.023 (3ème étage)
Aziliz Kondracki : Arabs got formats : l’adaptation d’une émission de télé-réalité britannique pour le monde arabe : une collaboration franco-libanaise
À partir de l’observation de la chaîne de circulation du format Idols, du distributeur jusqu’au diffuseur, la visée de cette recherche de Master a été d’analyser et de comprendre comment ce bien économique et culturel se transforme pour la production d’une émission locale. La transaction de ce format est encadrée par des dispositifs qui veillent à fixer les règles inhérentes à son processus d’adaptation et à réguler le processus de recyclage dont il fait l’objet. Les systèmes médiatiques britanniques et français participent à la formation du système médiatique panarabe en accompagnant les producteurs locaux dans la production de cette émission formatée. Dans ce décor, le format fait donc l’objet d’appropriations multiples, et le modèle de production dont le format est le véhicule devient le support d’un long processus d’agrégation et d’accumulation de savoirs, de techniques mais aussi de normes et de valeurs. En cela, l’émission dite locale est le résultat d’un processus transactionnel complexe dans lequel les idées circulent, sont générées ou reformulées. Dès lors, la construction et le maintien de relations sociales significatives entre acteurs divers semble devenir alors une condition sine qua non pour que ce bien circule, s’échange, se transforme.
Aziliz Kondracki est doctorante au Centre Norbert Elias de Marseille (EHESS, CNRS, INSHS) sous la direction de Boris Pétric. La thèse qu’elle prépare porte désormais sur la circulation d’un format télévisuel sud-coréen déjà adapté en France et qui le sera prochainement pour le monde arabe.
Séance 3. Jeudi 17 décembre 2020- salle 3.023 (3ème étage)
Romain Lecler, Une contre-mondialisation audiovisuelle ou comment la France exporte la diversité culturelle (en visioconférence)
La réussite de CNN International, le succès financier croissant des blockbusters d’Hollywood à l’étranger ou la diffusion des séries américaines sur les télévisions du monde entier : ces phénomènes ont incité à parler, dès les années 1980, d’une mondialisation audiovisuelle. Celle-ci est sans conteste dominée par les entreprises américaines. Mais des diplomates français ont réagi et initié très tôt une politique de « contre-mondialisation » audiovisuelle qui perdure jusqu’à aujourd’hui. Plusieurs chaînes de télévision transnationales, à commencer par TV5 en 1984, ont alors vu le jour. Une cinquantaine de spécialistes de la télévision et du cinéma sont apparus dans les ambassades françaises – expérience qu’aucun autre pays étranger n’a imitée. Le soutien aux exportations de cinéma et de télévision a aussi permis de mobiliser durablement les professionnels français de l’audiovisuel. Cette politique française a misé sur la diplomatie de la diversité culturelle plutôt que sur le box office international. Elle s’est tournée vers d’autres pays dominés dans la mondialisation audiovisuelle, comme les pays francophones, associés à TV5 ou les pays dits « du Sud », en particulier vers ceux d’Afrique et du Proche et Moyen-Orient.
Romain Lecler est professeur de politiques mondiales au département de Science politique de l’université du Québec à Montréal. Il est l’auteur de Sociologie de la mondialisation (Paris, La Découverte, 2013) et a coordonné le Guide de l’enquête globale en sciences sociales (Paris, CNRS éditions, 2015). Il a publié de nombreux articles sur la mondialisation audiovisuelle, la diplomatie culturelle, les marchés internationaux, les télévisions internationales et le cinéma du monde.
Séance 4. 21 janvier 2021 – salle 3.023 (3ème étage)
14h-17h
Séance hors-thème de reprogrammation de séances de l’année dernière
Maria Adib-Doss, Les talk-shows politiques en Egypte avant la révolution : des arènes de dissidence sous contrôle
Les talk-shows politiques en Egypte constituent un genre télévisuel qui a marqué la scène aussi bien médiatique que politique en Egypte pendant deux décennies. Accompagnant la vague de l’ouverture audiovisuel et installé pendant les heures de prime-time, ce dispositif a permis la manifestation de processus sociaux, notamment des mouvements d’opposition, en leur permettant de s’exprimer et de gagner en visibilité. Ces émissions ont fait partie de dynamiques de modernisation de l’autoritarisme sous Moubarak et les ont alimentées, défiant ainsi le pouvoir politique. Elles ont gagné des rôles et un espace de parole que le pays n’avait pas connu depuis 1952, dépassant leur fonction première qui était conçue par le pouvoir et ce, malgré les outils de contrôle que ce dernier a conservés pour garantir un minimum de mainmise sur les médias. Au fil du temps, les professionnels des médias ont pu élargir leurs marges de manœuvre, ce qui leur a permis de détourner les tentatives de contrôle et d’élargir ainsi les domaines de luttes et les espaces de contentieux. Cette présentation revient sur la naissance de ce dispositif, ses modalités de fonctionnement mais aussi sur les moyens de contrôle et de régulation exercés par le pouvoir politique.
Maria Adib-Doss, docteure en Science politique de l’Université Paris II Assas, rattachée au CARISM (Centre d’Analyse et de Recherche Interdisciplinaire sur les Médias), chercheuse associée à l’IEDES (Institut d’Etudes du Développement de la Sorbonne) et maîtresse de conférences associée à l’Université du Caire.
Marie Pierre-Bouthier : Parcours transnationaux de cinéastes marocains (des années 1950 à nos jours). Le cas de la formation des pionniers dans les années 1960-70
Cet exposé se propose de re-parcourir l’histoire du cinéma marocain, de ses cinéastes et de ses productions filmiques, à l’aune des progrès de l’histoire transnationale. Il s’intéressera plus particulièrement aux parcours de cinéastes entre plusieurs pays : formation à l’étranger, expatriation, bi-nationalité, ou co-production internationale. On effectuera dans un premier temps un panorama de ces différents liens possibles avec les pays étrangers pour les cinéastes marocains, en particulier les documentaristes : dans quelles conditions ces départs se font-ils ? quelles conséquences cela a-t-il sur les dispositifs de production ? quels liens sont-ils gardés avec le pays d’origine ? On verra que les femmes sont particulièrement concernées depuis les années 1980 par ce « détour par l’étranger » pour pouvoir travailler et devenir des cinéastes marocaines reconnues. Dans un second temps, on se penchera plus précisément sur la question de la formation à l’étranger, et plus particulièrement sur la période des années 1960-70 où les pionniers du cinéma marocain n’avaient d’autre choix que de partir étudier l’art filmographique à l’étranger, principalement à Paris et à Lodz (Pologne populaire). On verra dans quelles conditions ces départs (et ces retours) se faisaient, en quoi consistaient cette expérience étudiante, et quelles conséquences elle a pu avoir sur leurs carrières, leurs choix de vie, leurs dispositifs de production, et leurs ambitions de cinéastes.
Marie Pierre-Bouthier est docteure en histoire du cinéma de l’Université Paris 1, et diplômée de l’ENS de Paris en Cinéma et Etudes Arabes. Ses recherches, ainsi que ses activités de programmatrice au sein du « Maghreb des Films », portent sur les gestes documentaires de résistance au Maroc et en Tunisie, sur l’œuvre d’Ahmed Bouanani, sur les écoles de cinéma, et sur le genre documentaire. Elle a publié dans Trafic, la Revue d’Études des Mondes Musulmans et Méditerranéens et le Journal of North-African Studies.
Séance 5. Jeudi 11 février 2021
Chirine Ben Abdallah : Les enjeux de l’information à la télévision tunisienne publique en situation de transition sociopolitique (post janvier 2011)
Cette intervention reprend les conclusions de ma thèse soutenue en 2016. Au carrefour de la sociologie de l’art, la sociologie de la communication et la sociologie politique, ce travail a pour objectif de mettre en lumière les enjeux suscités par la production de l’information dans les chaînes de télévision tunisiennes à l’échelle à la fois macro (les relations institutionnelles) et micro (les acteurs concernés) sociale. Depuis l’indépendance, la télévision publique en Tunisie n’a cessé d’être le porte-parole des régimes successifs des présidents Bourguiba et Ben Ali. Utilisé à des degrés différents par les deux régimes comme un outil de propagande, l’audiovisuel tunisien se retrouve au lendemain du 14 janvier 2011 confronté à sa nécessaire reconstruction, avec un lourd héritage. Jusqu’alors, on ne s’intéressait à la télévision tunisienne qu’au niveau de ses contenus. Cette étude invite à réfléchir à la télévision en tant qu’outil, en tant qu’instrument social et politique.
Il sera plus particulièrement question ici des relations de coopération au cœur de la « transition démocratique » en Tunisie et plus particulièrement les relations franco-tunisiennes, en analysant le rôle et la stratégie audiovisuels de la France, ceux des chaînes de l’audiovisuel extérieur de la France et les actions d’accompagnement menées par les partenaires français. Compte tenu du recul nécessaire pour ce genre d’études, nous ne prétendons pas apporter une lecture analytique des processus en cours, mais plutôt proposer une simple photographie d’un secteur en pleine mutation. Nous avons opté pour une approche théorique « compréhensive », fondée sur les entretiens avec des journalistes, experts, acteurs du champ audiovisuel ou encore des cyberdissidents (24 en Tunisie, 18 en France). Nous avons souhaité à travers cette enquête documenter l’histoire de la télévision tunisienne et de ses relations avec ses partenaires internationaux. Nous y proposons une synthèse des principaux « moments » de cette télévision, par une restitution de la parole et des attitudes de ses acteurs tant dans sa période de régime autocratique qu’au moment de l’ouverture médiatique opérée depuis 2011, avec une analyse des modalités sociopolitiques du partenariat télévisuel franco-tunisien. Le contexte politique de l’après 14 janvier 2011 ouvre des possibilités nouvelles et demeure jusqu’à présent en perpétuelle mutation.
Chirine Ben Abdallah est enseignante à l’Université Sorbonne Nouvelle- Paris 3, chercheure associée au laboratoire Communication et politique LCP-Irisso. Elle a soutenu en 2016 une thèse en sociologie réalisée en cotutelle (Sorbonne Paris Cité, Université de Tunis El Manar). Spécialisée en sociologie de la communication et des médias, elle a eu plusieurs expériences professionnelles dans le monde académique et en dehors dans des organisations internationales.
Séance 6. Jeudi 11 mars 2021
Sonia Mejri, Analyse des conceptions et des images de l’islam et des peuples arabes dans les manuels scolaires français d’histoire : l’exemple de la représentation des femmes et des hommes musulmans
S’inscrivant dans le champ de l’histoire culturelle, cette analyse des conceptions et des images de l’Islam et des arabes dans les manuels scolaires d’histoire en France s’appuie également sur les travaux de sociologie et de psychologie sociale afin de mieux cerner les termes de représentation et de stéréotype. Elle est aussi empreinte des réflexions issues des sciences de l’éducation permettant de situer le manuel scolaire et son histoire. Par ailleurs, le contexte de cette étude inclut l’intérêt pour l’enseignement de l’histoire, qui élabore et transmet un récit historique public en faisant des choix parmi les savoirs, les évènements, les interprétations et les documents disponibles. Les programmes d’histoire encadrent les savoirs à dispenser dans les classes.
L’histoire de la naissance de l’Islam, de ses premiers siècles et des musulmans (arabes ou non) à travers le temps et l’espace font partie du programme d’histoire du collège et du lycée, en France, depuis moins d’un siècle. Le manuel scolaire vient en soutien à l’enseignement. Il a un rôle particulier dans la construction des identités, à la fois objet mis en place et validé par l’institution, socle et repère dans les relations entre l’enseignant et l’élève et photographie de la société à un moment donné. De nombreux chercheurs ont souligné l’importance de cet outil pour l’élève et le maître ainsi que pour la transmission des valeurs prônées. L’analyse des conceptions (manière de percevoir une idée) et des images (encadrement non-écrit) révèlent la présence et la persistance de stéréotypes (image préconçue d’un sujet dans un cadre de référence donné, telle qu’elle y est habituellement admise et véhiculée), la réification (aménagement de l’histoire qui exclut la diversité des niveaux d’approche de certains thèmes) et des contrastes réguliers entre l’histoire donnée à lire dans les manuels scolaires et l’histoire « savante »
Ma méthode d’analyse croise les façons dont se sont constituées ces conceptions, le choix et l’utilisation de l’iconographie et des textes. J’ai relevé et analysé les discours écrits, les documents iconographiques, les documents choisis, les cartes et les citations de référence. De ces analyses, je dégage, classe et compare les thèmes évoqués, les thèmes omis et la façon dont les thèmes sont présentés. J’ai également élaboré des critères de stéréotypes et de réification sur la base d’un relevé minutieux des photos et occurrences et leur classement selon s’ils véhiculent une vision négative, positive ou neutre. Les « trois systèmes de contraintes » de la compréhension d’un texte analysés par Roger Chartier cadrent l’ensemble de la méthode : le sens visé, la forme dans laquelle ce texte est disséminé, les conventions et les compétences partagées par les lecteurs qui reçoivent le texte. A la lumière de ces considérations, je présenterai un exemple, celui de la représentation de la femme et de l’homme arabo-musulmans et/ou musulmans.
Pour être plus précise sur le corpus, j’ai étudié les manuels scolaires du fond du Centre d’Etudes, de Documentation et de Recherches en Histoire de l’Education de l’ESPE de Montpellier, soit deux cent douze manuels scolaires recensés. La période historique retenue (1948-2008) pour le choix des manuels scolaires a été guidée par des changements majeurs survenus dans les instructions officielles. Tout en cernant les conséquences et répercussions des profonds changements historiques survenus en France et dans le monde entre 1948 et 2008, ce corpus vient également présenter les évolutions du manuel scolaire, fortement influencées par les changements en didactique tout en devenant un objet dans le vaste champ des produits de consommation. Pour déterminer le corpus, le choix s’est opéré en fonction des programmes. J’ai recherché les classes qui ont au programme d’histoire, un enseignement sur l’Islam et/ou les peuples arabes : la classe cinquième, de seconde et de terminale sont concernées. Plusieurs périodes de l’histoire de l’Islam et des Arabo-musulmans sont étudiées : naissance de l’Islam, civilisations au XIIe siècle, élargie par la suite à la Méditerranée au XIIe siècle, conflits et terrorisme (XXe siècle).
Bibliographie
Antoine Prost, Éducation, société et politiques. Une histoire de l’enseignement en France, de 1945 à nos jours, Paris, Seuil, coll. « Points histoire », 1992.
Roger Chartier, Au bord de la falaise : l’histoire entre certitudes et inquiétude, Albin Michel, Paris, 1998.
Roger Chartier, Les origines culturelles de la Révolution Française, Seuil, coll. « Points / Histoire », Paris, 1999 (réédition).
Mohammed Arkoun (dir.), Histoire de l’Islam et des musulmans en France, Du Moyen Âge à nos jours, Albin Michel, 2006.
Sonia Mejri est docteure en sciences de l’éducation de l’Université Montpellier 2. Enseignante spécialisée du premier degré, ses recherches portent sur les représentations du fait religieux, et plus particulièrement de fait religieux musulman. À travers l’analyse des textes, cartes et illustrations de manuels scolaires d’histoire, Sonia Mejri examine comment sont véhiculées et transmises les conceptions et les images de l’Islam et des Arabes et leurs évolutions sur soixante ans.
Séance 7. Jeudi 15 avril 2021
Celia Hassani, L’Institut Français du Liban : les relations d’un opérateur culturel majeur avec les scènes artistiques locales
En septembre 2020 sont/étaient prévues les célébrations du centenaire de l’État du Grand-Liban, proclamé par le général Henri Gouraud, représentant de l’autorité française mandataire sur la Syrie. La présence culturelle française au Liban va s’intensifier dès le milieu du XIXe siècle avec l’implantation d’écoles qui vont constituer des instruments de diffusion de la langue et de la culture françaises. La place importante de la francophonie au Liban forme un cas unique dans la région : on en veut pour preuve l’existence de neuf antennes de l’Institut Français sur l’ensemble de ce petit territoire. Lieu d’enseignement mais aussi de diffusion, l’Institut Français du Liban représente aussi un des opérateurs culturels incontournables de la scène locale. Cette communication cherchera à apporter des éléments d’analyse de la politique culturelle mise en œuvre par l’Institut Français au Liban. En le replaçant au sein d’une constellation d’acteurs locaux et étrangers, privés et institutionnels, il s’agira non seulement de mettre en évidence les problématiques liées aux différents circuits de financement et de labellisation, et leur impact sur la production artistique locale, mais aussi plus largement, d’apporter des éléments de compréhension aux phénomènes d’influence « réputationnelle » et de Soft power en examinant les missions et domaines d’action prioritaires de l’Institut Français ces dernières années.
Célia Hassani est doctorante à Aix-Marseille Université (IREMAM – LESA) et axe son travail sur le rôle et la mobilisation d’intermédiaires de l’art pour le développement des politiques culturelles au Liban. Elle a également obtenu une bourse de l’Orient Institut Beirut (OIB), centre de recherche allemand pour lequel elle réalise une étude sur les mécanismes de financement public de la culture au Liban, en partenariat avec l’ONG al-Mawrid al-Thaqāfī. Elle travaille également en tant que consultante dans le domaine du renforcement des capacités auprès d’acteurs culturels de la région MENA. Ses récents travaux de recherche portent sur les questions de l’art dans l’espace public dans le contexte libanais de la « révolution » d’octobre 2019. (Chapitre d’ouvrage à paraître dans Bristol : Policy Press).
Séance 8. Jeudi 20 mai 2021
Lectures
François Chaubet, La politique culturelle française et la diplomatie de la langue : l’alliance française (1883-1940), Paris, L’Harmattan, 2006 (présenté par Simon Mangon).
Mellouki Riffi, La politique française de coopération avec les Etats du Maghreb (1955-1987), Publisud, 1989 (présenté par Abdelfettah Benchenna).
Claire Visier, L’Etat et la coopération, la fin d’un monopole : l’action culturelle française au Maghreb, L’Harmattan, 2003 (présenté par Dominique Marchetti).
Séance 9. Jeudi 17 juin 2021
Olivier Koch et Simon Mangon, L’Union européenne, nouvel acteur de l’aide aux médias dispensée par la France en Tunisie
Canal France International (CFI) est l’opérateur « historique » de l’aide aux médias dispensée par la France à travers le monde. Depuis les années 2010, dans un contexte national de réductions budgétaires, cet organisme de diplomatie publique dépend plus largement des financements de l’Union européenne. Afin de cadrer avec les recommandations de ce bailleur de fonds, CFI a progressivement réorienté ses programmes en reprenant les catégories de l’Union sur les « bonnes » pratiques journalistiques et sur le type de « bénéficiaires » à privilégier. Ainsi, le journalisme « indépendant » ou d’« investigation », l’« empowerment » des femmes journalistes, ont concentré ou concentrent désormais une partie substantielle de l’aide aux médias en Tunisie. Cette évolution récente invite à penser le rôle que joue désormais l’Europe dans la normalisation de la production de biens culturels circulant de la France vers les espaces arabes.
Olivier Koch est maître de conférences à l’Université de Nice Sophia-Antipolis, membre de l’EUR Transitions (Institut Méditerranéen du Risque de l’Environnement et du Développement Durable) et rattaché au CARISM (Université Paris 2). Ses travaux portent sur les enjeux contemporains de l’internationalisation des médias.
Simon Mangon est doctorant à l’Université d’Aix-Marseille, rattaché au laboratoire du CHERPA (Sciences Po Aix). Il prépare une thèse sous la direction de Mohamed Tozy et Magali Nonjon. Son travail porte sur le monde du « développement médias », sur l’émergence de médias « indépendants » en Tunisie et en Jordanie, et sur les dispositifs internationaux de soutien au journalisme.