Environnement
Alors que des études internationales mettent en relation la pollution sonore due au trafic maritime et à la perturbation des écosystèmes marins, la fragilisation de ces derniers dans la mer Rouge devient de plus en plus préoccupante. Les écosystèmes sont gravement menacés d’extinction par la pêche intensive et des accidents pétroliers selon plusieurs experts.
En février, le port de Nuweiba a connu une fuite de pétrole attribuée à un bâtiment battant pavillon chypriote. Le désastre écologique a été en partie nettoyé à Ras Gharib, dans le Golf de Suez, a annoncé le chef du département central pour la gestion du Ministère de l’Environnement, Katwhar Hanafy, le 27 février. Il a déclaré que des mesures avaient été prises pour nettoyer la fuite qui a eu lieu à Hurghada, suite à un acte criminel sur un pipe-line.
La prise de conscience de l’urgence écologique et de la nécessité d’un nettoyage du littoral égyptien apparaît également au travers d’initiatives citoyennes comme à Taba, à proximité de la frontière israélienne, où le 27ème anniversaire de la fin de l’occupation israélienne, le 22 mars dernier, a été marquée par une grande campagne de nettoyage des plages et des récifs de coraux par des professionnels du tourisme. Malheureusement, on ne peut que déplorer la marginalité de telles initiatives, tout comme l’attitude irresponsable de touristes tant étrangers qu’égyptiens, ainsi que des projets gouvernementaux désastreux.
La remise à l’ordre du jour d’un ancien projet de pont sur la mer Rouge entre la péninsule du Sinaï et l’Arabie Saoudite, lors de la visite du roi Salman au Caire début avril, mobilise actuellement les acteurs régionaux pour sauvegarder l’environnement. Les professionnels du tourisme et experts de l’environnement alertent, en effet, d’une possible catastrophe écologique.
Par ailleurs, l’importance de la gestion et du recyclage des déchets prend de l’ampleur. Khaled Fahmy, ministre de l’environnement, a annoncé le 12 avril, la signature d’un contrat de 30 millions LE pour récolter les déchets. Ce projet vise à remplacer le système informel et inefficace de collecte de déchets dans le district d’Imbaba. Le recyclage pourrait devenir un domaine économique porteur pour les entrepreneurs égyptiens. La firme égyptienne Elite Environnement Energy a, par exemple, déclaré le 16 avril, qu’elle allait signer un contrat de 200 millions LE pour équiper l’armée égyptienne avec des matériaux recyclés. Le Premier ministre, Sherif Ismaïl, a également créé un comité interministériel pour le développement de projets de recyclages.
La 6ème Conférence ministérielle africaine sur l’environnement (African Ministerial Conference on the Environment – AMCEN) qui a réuni 54 ministres de l’environnement, s’est tenu au Caire les 18 et 19 avril. Intitulée “Agenda 2030 et Accord de Paris : de la politique à la mise en œuvre en Afrique, elle a été l’occasion pour le Premier ministre égyptien d’exhorté ses homologues à développer des projets bilatéraux sur l’environnement.
Eau & Agriculture
Des chercheurs de l’université d’Alexandrie ont publié le 11 mars une étude sur une nouvelle méthode de désalinisation. Alors qu’une vague de protestations contre la hausse du prix du gaz, de l’électricité et de l’eau s’organise depuis le début du mois, cette nouvelle technique pourrait apporter de nombreuses solutions aux pénuries d’eau en Egypte. Des centaines d’égyptiens dénoncent la hausse exponentielle de leurs factures en les publiant sur internet.
Le ministère de la coopération international égyptien a expliqué le 5 avril que le Fonds Arabe pour le Développement Social et Economique (FADES) allait financer des projets pour l’agriculture et l’irrigation à hauteur de 365 millions de dollars US, dont 165 millions seront alloués au recyclage de l’eau dans le sud Sinaï.
En parallèle, le gouverneur de Monufiya, gouvernorat au nord du Caire, a indiqué le 9 avril la suspension de deux responsables pour avoir rechigné à mettre en œuvre un projet de station de pompage d’eaux usées.
Lors de sa visite le 17 avril, le président français, François Hollande, a permis la signature de plusieurs contrats sur l’irrigation et la gestion des eaux usagées, dont un contrat de 60 millions d’euros qui devrait financer une station d’épuration à Alexandrie.
La question de l’eau en Egypte passe aussi par l’éducation et la sensibilisation. A l’occasion de la journée mondiale de l’eau le 22 mars, l’entreprise Nestlé, en partenariat avec le ministère de l’Education, a lancé une campagne de sensibilisation pour promouvoir l’économie d’eau en Egypte dans 30 écoles à Banha, capitale du Gouvernorat de Qalyubia, au nord du Caire.
Eau et agriculture sont étroitement liées : le ministère des ressources d’eau prévoit d’irriguer 400 feddans (mesure de superficie qui équivaut à 0,42 hectare) dans le nord Sinaï en utilisant le canal Al-Salam. Quatre-vingt-cinq feddans ont déjà été alloués à des investisseurs injectant près de 5 milliards LE dans ce projet.
La question de l’eau ne peut pour autant pas se résoudre à l’échelle strictement nationale. Le ministre de la ressource en eau, Mohamed Abdel-Ati, s’est rendu le 19 avril au Soudan pour discuter de la coopération régionale et des enjeux de l’eau, avant de rejoindre l’Ethiopie pour l’”Africa Climate Resilient Infrastructure Summit”. Il est également prévu qu’il discute avec son homologue éthiopien de quelques divergences qui subsistent encore et toujours malgré l’accord passé sur le barrage grand Renaissance.
Après plusieurs semaines de controverses et d’hésitations sur la politique d’importation du blé, le chef de l’autorité de quarantaine du ministère de l’agriculture a été remercié le 7 mars dernier par le ministre Essam Fayed. Ce licenciement a eu lieu à la veille d’un important sommet au Caire avec l’UNFAO, Food and Agriculture Organization of the United Nations, pour discuter d’une coopération en matière d’irrigation et d’énergie solaire en Haute Egypte et dans le Sinaï.
Le ministère de l’agriculture est régulièrement soupçoné d’irrégularités. Le précédent ministre, Selah Helal, purge actuellement une peine de 10 ans de prison pour corruption. Le ministère affronte également la colère de dizaines d’employés qui demandent une amélioration de leurs contrats. Enfin, le ministère est également beaucoup critiqué depuis sa tentative malheureuse de développer la filière rizicole égyptienne, tentative qui n’a fait qu’augmenter les prix malgré les surplus de production.
La société de stockage de grain Blumberg espère remporter un très important contrat de stockage qui pourrait permettre à l’Egypte de réduire ses pertes agricoles et ses importations. Les efforts ministériels se concentrent désormais sur la filière coton afin de pouvoir répondre à la demande intérieure et booster les exportations.
D’autre part, les autorités égyptiennes ont alloués 20 235 hectars de terres arables aux investisseurs saoudiens lorsde la visite du roi d’Arabie Saoudite au Caire.
Energie
Nucléaire
Le président Abdel Fatah el-Sissi a annoncé le 10 mars, que le Caire et Moscou s’étaient mis d’accord pour construire la première centrale nucléaire égyptienne. A la fin du mois de mars, le ministre des affaires étrangères, Sameh Shoukry, s’est rendu à Washington pour le sommet sur la sécurité nucléaire.
Le groupe russe Rosatom, co-organisateur de la semaine de l’énergie nucléaire à l’université d’Alexandrie n’a pas caché ses intentions de conquérir l’ensemble du marché nucléaire égyptien après avoir obtenu le contrat de construction d’une centrale nucléaire à l’ouest d’Alexandrie. La France souhaitant être présente dans tous les domaines de coopération bilatérale, le président François Hollande a indirectement annoncé, pendant un forum de coopération le 18 Avril, que Paris aiderait le Caire à développer son industrie nucléaire civile, selon le quotidien al Masry al Youm.
La société civile égyptienne déplore, dans un rapport intitulé “80 Gigawatts of Change, Egypt’s future Electricity Pathways”, publié fin mars, que les décisions en matière d’orientation stratégique pour l’énergie ne soient pas prises en concertation avec elle.
Le ministère de l’électricité égyptien multiplie les contrats avec les partenaires étrangers (français, allemands et saoudiens) pour moderniser le parc égyptien, notamment la centrale de Caire-Ouest et trois nouvelles stations à Guizeh. En tout, plusieurs accords bilatéraux ont été signés pendant la visite du roi Salman d’Arabie Saoudite pour financer de nouvelles centrales solaires et éoliennes. Le géant saoudien en énergie renouvelable, Abdul LatifJamel, a déclaré le 13 avril, renoncer à un investissement de 700 millions de dollars, justifiant son abandon par la sclérose de la bureaucratie égyptienne.
Cela ne semble pas inquiéter le ministre de l’électricité plus que nécessaire car les capitaux étrangers affluent : la Deutsche Bank et HSBC ont investi 3,5 milliards d’euros dans les centrales égyptiennes au profit de Siemens. Tout cela a un coût puisque le ministère a également fait part de son intention de réduire les subventions sur le prix de l’électricité à partir de Juillet 2016 et de les supprimer totalement en 2019. Il est tout de même prévu de préserver, tout en gardant près de 9 milliards LE pour aider les ménages les plus modestes. Rappelons que l’Egypte est le plus gros consommateur africain d’électricité et bénéficie, pour l’instant, d’un des prix d’électricité subventionnée les plus bas du monde, son modèle jusqu’à présent étant loin d’être rentable. Ainsi l’Egyptian Electricty Holding Company a demandé le 16 avril un prêt de 15 milliards LE pour pouvoir rembourser ses dettes.
L’Egypte est toutefois dans la bonne direction et semble avoir compris son énorme potentiel en énergie solaire, bien qu’elle peine à accorder des terres aux investisseurs pour installer de nouvelles centrales.
Gaz & Pétrole
Avant même les accords spectaculaires officialisés pendant la visite du roi Salman d’Arabie Saoudite, les autorités égyptiennes se sont rendus à Riyad le 20 mars dernier pour se faire octroyer l’équivalent de 5 ans de consommation égyptienne de pétrole par les saoudiens. La dette égyptienne pour le pétrole étranger atteint 3,2 milliards de dollars fin mars 2016. Les égyptiens bénéficient d’un prêt de 2 milliards de dollars à intérêts de 2% pendant 20 ans avec une période de grâce de 5 ans. Par ailleurs, le gouvernement égyptien a soutenu le 6 avril que les négociations pour importer du gaz naturel d’Israël devraient reprendre bientôt. En attendant, British Petroleum commence la construction d’une exploitation de gaz à Rosette d’une capacité journalière de 600 mille m3. Sah Nasr, ministre de Coopération internationale, a officialisé le 13 Avril un accord de 80 millions d’euros avec l’Agence Française de Développement (AFD) pour raccorder des milliers de ménages modestes au réseau de gaz naturel.
Le ministre des finances, Amr el Garhy, a averti, le 9 avril dernier, vouloir réduire de 43% les subventions sur l’essence qui pèsent sur le budget 2016-2017. Le montant de ces subventions est déjà passé de 61 milliards de LE à 35 milliards de LE depuis 2015. Le ministre compte sur une chute accrue des prix du pétrole pour faire passer la mesure. À en croire l’OPEP, les perspectives de croissance de la demande mondiale de pétrole pourraient être moins bonnes que prévues. Le sommet qui s’est tenu à Doha le weekend du 16-17 Avril s’est soldé par un échec et n’a en rien arrangé la situation catastrophique pour les exportateurs de pétrole. Alors que l’Agence Internationale d’Energie aimerait voir la situation se stabiliser, les investisseurs anticipaient une crise et l’échec des négociations à Doha. Le résultat n’est cependant guère surprenant lorsqu’on fait assoir l’Arabie Saoudite et l’Iran à la même table pour discuter du pétrole : le 16 avril, l’accord historique tant espéré entre membres de l’OPEP et non-membres a laissé place à la crise tant redoutée, fragilisant encore plus la crédibilité de l’OPEPet faisant encore un peu plus chuter les prix mondiaux.
X. T.